🐟 Avant le plongeon

« Pourquoi donc faire aujourd’hui ce qui pourrait être reporté à demain ? » said no one ever
Quand je suis entrée en prépa, je me suis dit que la pluralité des matières enseignées me laissait le temps de choisir. Le moment venu, j’ai compris que la fac exigeait un choix de spécialisation que je ne n’étais pas prête à faire. Ce qui explique mon soupir de soulagement devant le répit que m’offrait l’école de commerce. Aujourd’hui j’entends mes amis parler conseil et une part de moi se dit “pourquoi pas ?” Conclusion ? Je crois que j’ai peur de choisir.
Le sujet du jour porte sur la procrastination, plus exactement sur la (non-) spécialisation. Comment se fait-il que nous soyons si nombreux à 20 ans passés à être aussi indécis et perdus ?
Avant de commencer, je te propose de prendre une petite pause. Assieds-toi sur le bord du bassin, les pieds dans l’eau, et ferme les yeux quelques secondes. Concentre toi sur le clapotis de l’eau, la douce odeur de chlore qui flotte dans l’air, et prépare toi à sauter.
Bonne lecture 🏊‍♀️
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🦀 Mais où va t-on ?

« J’ai toujours pris la voie la plus ouverte, que ce soit au lycée avec mon bac, en faisant le choix d’aller en prépa… Même mon Master était généraliste ! Donc oui, aujourd’hui j’ai l’impression que toutes les portes me sont ouvertes, mais quelle valeur cela a-t-il si je ne sais pas laquelle j’ai envie d’ouvrir ? » M.
Si tu te reconnais dans ces témoignages, saches que tu fais partie d’un des clubs les plus peuplés de France : celui des indécis.
 
Ami·es paumé·es bonjour
Ami·es paumé·es bonjour
 
Qui ici n’a jamais entendu parler du parcours Bac S, prépa, ENS (ou école de commerce ça rime aussi) ? Aussi connu que sa cousine – la non moins fameuse trilogie “métro, boulot, dodo” –, cet enchaînement se révèle être finalement la norme pour bon nombre d’élèves en manque d’inspiration. Quoi de mieux en effet qu’un chemin où la procrastination professionnelle est monnaie courante ? Cet entonnoir se termine d’ailleurs bien souvent en conseil ou en audit – où se retrouvent au moins 40% des diplômés de mon école et bien d’autres. Le fil rouge ? Le non-choix. Dans son article dédié à l’orientation professionnelle, Tim Urban explique très justement l'anxiété ressentie à la sortie de l’enseignement par le phénomène suivant : toute notre vie, nous sommes guidés pour passer d’une étape à une autre – comme si nos existences suivaient le cours d’un ruisseau. Nos seuls choix dans cette configuration étant : “comment réussir dans telle ou telle discipline” ? Ou encore : “comment passer au niveau suivant” ? Ainsi, lorsqu’à la vingtaine arrive l’heure de statuer sur un métier, son avenir professionnel, c’est souvent le premier vrai choix de notre vie dans le domaine. Et quelle décision ! Opter pour une spécialisation, une carrière, etc. est souvent présenté comme LE choix qui forgera notre futur. Le premier d’une longue série.
Je parlais précédemment de la crise comme un exhausteur de culture d’entreprise ; elle agira sûrement de la même manière sur la manière dont les étudiants abordent leur avenir. Qui sait, la sécurité de l’emploi reviendra t-elle au premier plan de nos envies professionnelles et conditionnera nos choix ?
 

🦑 « With great power ….

comes great responsibilities »
« En fait j’ai surtout voulu minimiser le risque et ne me fermer aucune porte »
Il est donc tout à fait compréhensible d’hyper-ventiler à l’idée de passer d’un monde confortable – où chaque jalon du parcours est soigneusement balisé – à la “jungle” du travail, le tout en quelques mois. L’affaire d’une obtention de diplôme finalement. Aucun étonnement non plus face à l’envie de certains de retrouver le confort perdu d’un chemin où tous les possibles semblent ouverts – aka, généraliste, aka, le conseil.
Mais y a t-il un profil type pour être touché par le virus de la procrastination ? Au fur et à mesure de mes rencontres, je me suis aperçue que je partageais quelques points communs avec les “perdu·es” de l’orientation. Bon·ne élève en général, nous nous sommes tou·tes engagé·es dans un cursus long avec l’envie de garder les possibles ouverts. Un choix certes confortable, mais non pas anodin, puisqu’il nous assurait d’être entouré le plus longtemps possible. Et ce jusqu’à aujourd’hui où le snooze n’est plus une option.
Au contraire, j’ai l’impression que ceux ayant dû effectuer des choix professionnels “décisifs” jeunes envisagent plus sereinement leur avenir aujourd’hui. Comme si faire un choix n’était finalement qu’un énième soft-skill, un simple muscle à entraîner. La réponse serait-elle si évidente ? Suffirait-il donc d’engager plus tôt les étudiants dans la construction de leur futur ? La tendance des “camps d’orientation” par quelques incubateurs ou hubs d’innovation semblent en tout cas aller dans ce sens.
« Rien ne sert d’aller loin, il suffit de partir à point 🐢 » Not la Fontaine
Peut-être tenons-nous là une des causes de la fameuse “crise du quart de siècle” : un trop plein de choix jusqu’alors repoussés. Un peu à l’image d’un élève paniquant devant sa copie blanche la veille d’un rendu de devoir planifié depuis longtemps.
Je crois que c’est en partie pour ça que j’aime la métaphore de la piscine lorsqu’on parle orientation. Car tout nageur aguerri a commencé par faire ses armes en brassard avant de dompter le grand bassin et maîtriser la nage papillon. Et donc, pour choisir sa voie, cela pourrait se traduire par prendre de petites décisions concernant ses études tôt pour arriver plus préparé·es à la sortie.
 
Une course sans but ?
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🐟 « Choisir c’est renoncer » - Vous avez 6h

« Pour l’instant je n’ai vraiment aucune idée de ce que je veux faire plus tard. Je repousse constamment le moment où je devrai me spécialiser. En fait, je crois que j’ai peur de passer à côté de quelque chose si je me décide trop tôt. Le pire serait de me dire un jour “j’aurais dû faire autrement”.
Si ce témoignage est un des premiers publiés sur le site du projet lors de sa naissance en 2018, il traduit un sentiment assez répandu en école : la peur de l’impasse. Autrement dit, celle d’être coincé·e sur un chemin qui ne correspond finalement pas.
À l’heure où se multiplient les podcasts sur les trajectoires alternatives, il semble pourtant qu’on apprenne encore aux jeunes que la spécialisation est la clef de tout succès, le tout teinté d’un certain élitisme - la finance avant la compta et l’audit avant l’entrepreneuriat. Quelques observations : avoir une carrière, au sens où l’entendent nos parents, semble assez éloigné de la réalité d’un monde sans cesse en mutation où l’on affirme que 85% des emplois de 2030 n’existent pas – cf pôle emploi.
Selon Pôle emploi, la prochaine génération sera amenée à changer 13 - 15 fois de job dans leur vie. Comment donc penser la continuité dans ce contexte ?
Parallèlement, les millennials souhaitent plus de liberté et d’autonomie dans leur vie professionnelle, favorisant l’apprentissage à la routine. Mais de tels changements nécessitent une agilité que n’ont pas forcément les entreprises actuelles s’appuyant encore sur des critères de recrutement “classiques” (expériences précédentes, matières choisies, etc.). Quelques structures comme Adecco et leur initiative CEO for One Month tentent ponctuellement d’inverser la tendance mais ne représentent pas la majorité. Le mouvement freelance que l’on voit d’ailleurs prospérer en ce moment est aussi témoin d’une envie nouvelle de trouver des modes de collaboration et de travail différents.
Toutes ces contradictions contribuent à créer une certaine incertitude, voire angoisse au rang des étudiants : serai-je coincé·e à vie dans le même job à cause de mes choix ? Ai-je le bon profil pour cet emploi ? La non-spécialisation devenant alors une bouée de sauvetage à laquelle se raccrocher en temps de doute comme celui que nous traversons.

👀 So what ?

« Now I think it’s one of the most useless questions an adult can ask a child—What do you want to be when you grow up? As if growing up is finite. As if at some point you become something and that’s the end » Michelle Obama, Becoming
Loin de moi l’envie de t’encourager à jouer ton avenir à pile ou face. Rappelons nous seulement qu’aujourd’hui les possibles sont plus ouverts qu’avant. Quoiqu’il arrive, il est toujours possible de revenir en arrière ou de recommencer. Choisir n’est pas nécessairement exclusif, c’est un processus. Et pour faire écho à Michelle Obama, un dernier témoignage :
« J’avance par sauts de puce. Je ne sais pas vraiment où je veux aller mais chaque expérience m’a fait découvrir un domaine ou réveillé un intérêt particulier. Je n’aurais jamais pensé finir en finance en commençant dans l’art » G.
 
 

🛠 Quelques ressources avant de se quitter

👉 La lettre paniquée d’un·e étudiant·e aux portes du supérieur se demandant “What if I make the wrong choice?
👉  Pour un brain fart dans les règles de l’art sur les processus de décision : le film Yes Man
👉 Parce qu’on ne peut pas parler procrastination sans citer le TED de Tim Urban What happens in the mind of a master procastinator
👉  Pour se souvenir qu’un choix n’est pas décisif, va faire un tour sur le compte Des chèvres dans le Larzac ou le podcast Pourquoi pas moi. Tu pourras y lire / écouter des histoires de reconversion
👉  Une toolbox de l’orientation si tu veux voir ce que j’utilise pour ajouter du chaos dans ma vie d’indécise
 

Ça t’a plu ? Fais passer le mot !
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À très vite pour un nouveau plongeon 🐋